Voguer au fil de la mémoire
Le 6 janvier, 2020 — 5:30 pmLe texte qui suit a été composé il y a plusieurs années. J’y déclarais vouloir me lancer dans un projet que j’ai abandonné depuis, mais que je reprends aujourd’hui sous une autre forme.
Déjà, la nécessité de faire un travail de mémoire m’apparaissait incontournable. Je me rebelle viscéralement depuis toujours à l’idée que l’humain dans sa complexité magnifique (dont je suis un exemple bien imparfait, mais exemple tout de même!) soit condamné à disparaître…
J’admire profondément le travail de ceux et celles qui réussissent à mettre sur le papier les souvenirs de notre parcours terrestre : historiens, chroniqueurs, anthropologues, ethnologues, mais surtout biographes et auto-biographes.
En revanche, comme je ne suis pas dotée d’une mémoire des faits et des sensations suffisamment fidèle, je m’en remets à l’expérience de la ‘madeleine’ proustienne bien connue.
Et ma ‘madeleine’, ce seront les composantes de ces amoncellements aléatoirement organisés que sont mes quelques bibliothèques. Chaque livre me servira en fait de ‘madeleine’, une ‘madeleine’ à partir de laquelle diverses évocations affleureront à mon esprit et se développeront librement.
Alors que je lance ce blogue, je me réjouis de pouvoir m’y laisser emporter par le souffle puissant et imprévisible de la mémoire.
Ce matin-là, une image m’a traversé l’esprit au petit déjeuner.
Je me suis perçue comme un patrimoine à moi toute seule, ni plus ni moins important que d’autres, mais patrimoine tout de même.
J’ai ressenti l’urgence de laisser des traces.
J’ai texté à ma fille adorée les mots suivants :
Regarde-moi bien
Car
Dans peu de temps
Je
Sera
Une Autre.
Cela je crois lui a fait un peu peur.
Quand on est jeune, on n’a pas le sentiment de la fugacité implacable du temps qui passe et efface tout sur son passage.
Alors voilà : sur des feuilles de papier de toutes les couleurs, j’écrirai des mots, je collerai des images, des photos, je dessinerai. Cela se fera en vrac, dans le désordre, au fil des jours. J’y dresserai des listes, selon les caprices de ma pensée s’envolant dans toutes les directions. J’y noterai des passages de textes aimés. Il n’y manquera que la musique… mais je tâcherai d’inclure des notations dites d’ambiance.
J’emprunte les mots qu’Hélène de Billy fait entendre dans son charmant petit livre ‘Proust à Ste-Foy‘ : « j’entamerai une vie fort différente de l’ancienne, tournée vers l’intérieur, et je serai transportée par les beautés de ce nouveau présent révélé ».